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Un livre de Patricia Reznikov, Le songe du photographe


Voici un livre fort intéressant qui était resté sur mes étagères, je viens de m’y plonger avec délice.


Patricia Reznikov, autrice franco-américaine, aborde ici tout un aspect de notre histoire européenne. Paris 1977, le jeune Joseph, revenant du lycée est sollicité par un vieux monsieur, Sandor, pour l’aider à transporter un piano sous une pluie battante. Bon gré, mal gré, Joseph s’attelle à la tâche. Cette rencontre inopinée va bouleverser sa jeune existence, Joseph deviendra pendant deux ans un familier de la maison de la rue des Artistes. Quelle famille d’accueil ! Sandor, Hongrois grincheux, amoureux des grands photographes de l’entre-deux-guerres, sa jeune compagne Dorika, belle et mystérieuse, le Russe Serguei, réchappé du communisme et la Viennoise Magda, rescapée de la guerre. Angel enfin, peintre cubain, fuyant la dictature. Autant de survivants aux tragédies du siècle qui commentent vivement les malheurs du temps autour d’une table toujours bien mise.


Pour Joseph, dont les propres attaches familiales sont conflictuelles, au mieux absentes, cette rencontre est la découverte de la « Mitteleuropa », immense berceau culturel et intellectuel mais aussi terriblement malmenée par l’histoire. Un parcours initiatique au milieu de ces exilés, vivant dans leurs douloureux souvenirs. En ce sens, ce livre ma rappelé, un court roman d’Irène Némirovsky, Les mouches d’automne, qui dépeint des exilés russes, enfermés dans leur nostalgie et qui se heurtent aux murs et fenêtres comme le font les mouches d’automne peu avant de mourir.


A travers le personnage de Sandor, ce récit est bien sûr un immense hommage à la photographie du XXème siècle, comme moyen de saisir et transmettre un héritage aux générations futures: « Le photographe est celui qui regarde le monde et qui espère. Il espère qu’il saura le surprendre dans ses convulsions, le déchiffrer. Pour témoigner, pour le rendre meilleur peut-être. Mais…, ce n’est qu’un songe. Car il est lui aussi dans la photo et il se regarde rêver. ».


A noter que Patricia Reznikov est exigeante vis-à-vis de son lecteur : si on veut pleinement goûter à ce roman, il n’est pas inutile de consulter les œuvres des photographes August Sander et André Kertész, parmi d’autres, lire ou relire Sandor Marai , Imre Kertész, Joseph Roth… et avoir à portée de main quelques plans de Budapest, Vienne et Cologne. En fait, j’aime bien quand une lecture en appelle une autre, et encore une autre…

Patricia Reznikov, Le songe du photographe, Albin Michel, 2017



Patricia Reznikov, a Franco-American author, takes on an entire aspect of European history. Paris 1977; a young man named Joseph on his way home from school is stopped by an old man, Sandor, who asks him to help carry his piano under the pouring rain. Joseph reluctantly accepts. This unexpected encounter would change the young man's life forever. For the next 2 years, Joseph spends almost all of his time in his new acquaintances’ house, desperate to escape his own unstable family. He quickly develops a close relationship with Sandor, a moody Hungarian, admirer of great photographers from the entre-deux-guerres; his young and mysterious companion Dorika, Serguei, who escaped Russian communism during the war, and finally a Cuban painter running from dictatorship. This unlikely “family” of survivors of the tragedies of the 20th Century tells their stories in a lively, charming way around their dinner table.


To fully enjoy this novel, it may be worth consulting the works of photographers August Sander and André Kertész as the book was clearly written in homage to 20th Century photographers (seen through Sandor) and their ability to convey their heritage to future generations. A few maps of Budapest, Vienna and Cologne, along with novels by Sandor Marai, Imre Kertész or Joseph Roth would also help to better connect with the various characters and their historical and cultural backgrounds.



© Article par Catherine Guiat

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